14 février 2019

Fin de règne à Caracas : Le gouvernement de Nicolas Maduro au Venezuela est-il arrivé en bout de course ?

A l'interne, l'hyperinflation, l'effondrement économique et le virage autoritaire du régime tournent à la tragédie. Les classes populaires, bénéficiaires de la rente pétrolière sous Hugo Chávez, s'en détournent peu à peu et votent avec les pieds: en trois ans, trois millions de personnes ont quitté ce pays, près de 10% de la population. Les médias d'opposition sont réprimés, la justice inféodée, les élections manipulées. Pour contourner le Parlement où l'opposition détient la majorité depuis 2015, le régime a créé une Assemblée constituante fermée à l'opposition. C'est d'ailleurs du Parlement devenu le cœur de l'opposition au régime que Juan Guaido, président auto-proclamé ce 24 janvier, tient sa légitimité. Les forces armées, cubanisées, participent à la manne pétrolière ainsi qu'à l'import-export de produits licites ou illicites. Elles appuient encore Maduro. Mais de plus en plus de militaires passent à l'opposition ou désertent. Ils pourraient faire basculer le régime.

A l'international, ses alliances battent de l'aile. Cuba, payé en pétrole, s'enfonce dans la crise même si ses services secrets travaillent encore pour Maduro. La Chine qui lui a prêté 19 milliards US$, remboursés en pétrole, a décidé de limiter son crédit. La Russie, fournisseuse d'armes et engagée pour plus de 17 milliards US$, appuie le régime, mais dans le cadre d'une partie d'échec planétaire. L'Iran, la Turquie, le Nicaragua, la Bolivie et la Corée du Nord - on a les amis qu'on peut - ont d'autres priorités.

Treize pays latino-américains, réunis avec le Canada dans le "Groupe de Lima" ont demandé de nouvelles élections présidentielles, ce que Maduro refuse. Ils appuient maintenant Guaido, à l'exception notoire du Mexique qui reste neutre. L'Europe s'aligne grosso modo sur le Groupe de Lima.

La relation compliquée de dépendance mutuelle avec les Etats-Unis repose sur le pétrole dont le Venezuela détient, en comptant les bitumes de l'Orénoque, les principales réserves mondiales. Il en a fait l'exemple même de la "maladie hollandaise" au moins 95% de ses revenus en proviennent. Or, le président Trump s'est juré de mettre à terre le régime socialiste, l'asphyxiant par des sanctions financières, s'engageant en faveur de Guaido, manipulant l'aide d'urgence et menaçant d'une intervention militaire. L'étau se resserre.

Illégitime, impopulaire, isolé, corrompu, la question n'est plus de savoir si le gouvernement Maduro va tomber, mais quand.
 

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Marc Hufty
Professeur titulaire d’études du développement